Everybody's Gone to the Rapture : le ravissement
Jeux Vidéo Publié par Violaine le
Exclusivité PS4 sortie le 11 août dernier, Everybody's gone to the Rapture pourrait bien débarquer prochainement sur PC. Après avoir été séduite par la beauté de sa bande-annonce et de ses premières images, j'étais finalement complètement passée à côté de cet ovni l'été dernier.
Alors ça en jette, nan ?
Pour ceux qui n'en auraient pas entendu parler, c'est le Studio indépendant The Chinese Room - à qui l'on doit Dear Esther en 2012 et le très controversé Amnesia : a machine for pigs - en collaboration avec Santa Monica Studio (filiale de Sony), qui revient en force avec ce petit bijou. Bijou tout du moins pour ceux qui acceptent de le prendre tel qu'il est, de ralentir un peu le temps et de ne pas forcément trouver toutes les réponses à leurs questions. Un seul mot d'ordre avant de se lancer dans cette belle expérience : le lâcher prise !
Si vous avez envie d'action, de bastons ou d'énigmes ardues, mieux vaut passer votre chemin ! En revanche, si vous cherchez un peu de douceur dans ce monde de brut ou si vous souhaitez une petite pause pour vivre une expérience différente, bienvenue !
Cette semaine, j'en avais envie et je me sentais cap' alors je me suis enfin laissée porter, sans m'presser, par Everybody's gone to the Rapture et vous livre donc mes impressions. Mieux vaut tard que jamais !
Une beauté éblouissante
Difficile de ne pas commencer le jeu bouche bée face à des paysages et graphismes d'une beauté éblouissante. Et pour cause ! Everybody's gone to the Rapture a été développé à l'aide du Cry Engine, le moteur de jeu de Far Cry.
Si l'on comprend très vite qu'il va être assez limité en termes de Gameplay, cela ne va rien retirer au plaisir que l'on a à se déplacer (en vue subjective évidemment) dans des décors au rendu photo-réaliste bluffant. Quant aux animations, si certaines, comme le mouvement des végétaux par exemple, sont à mon goût de moins bonne qualité que celles de The Vanish of Ethan Carter (dont je vous reparlerai prochainement), d'autres, comme par exemple le mouvement des draps au vent ou à notre passage ou encore celui des ombres, sont très réussies.
On s'y croirait dans ce village anglais complètement inhabité et on n'a qu'une envie : se promener sur ses jolis sentiers, visiter ses nombreuses maisons abandonnées, ou encore piquer une petite brasse dans ses magnifiques ruisseaux (bon, ça c'est pas possible). En bref, cela faisait longtemps que je n'avais pas pris une telle claque visuelle ! Si bien que j'ai bombardé le jeu de captures écrans.
En plus de ça, la map s'avère être bien plus grande que ce que l'on peut nous laisser imaginer pendant les premières heures de jeu. Heureusement pour mon sens de l'orientation des petits plans indiquant votre position sont consultables un peu partout dans le village et vous permettent de repérer les lieux à visiter tel un vrai petit touriste. Bon, un touriste dont on ne connaît pas l'identité ni la nature (même si, vu le bruit des pas il semblerait qu'il s'agisse bien d'un humain) seul au monde dans un village abandonné, mais un touriste quand même !
Mais ce n'est pas une simple promenade qui nous attend dans le village. Car si le temps s'y est arrêté depuis le 6 juin 1984 à 6h07 (comme l'indiquent toutes les horloges), jour où la région a dû être mise en quarantaine à cause d'une étrange épidémie, il semblerait qu'il ait encore des choses à nous dire.
Suivre à la trace
Laiiissons laiiissoons eeentrer le soleil laissson-ons laissooons ! Hum, pardon, c'est l'excès de vitamine D ! Car, à défaut de pouvoir en profiter IRL en ce moment (la Normandie quoi), j'ai bien profité du soleil dans le village très lumineux de Yaughton.
C'est d'ailleurs grâce à la lumière que vous allez avancer dans le jeu qui vous offre deux options :
-
- Vous êtes plutôt rêveurs pas pressés ? Alors choisissez l'option 1 (que je vous conseille vivement dans tous les cas) : vous fouillez tranquillement les lieux dans leurs moindres recoins, sans hésiter à aller vous perdre dans la cabane au fond du jardiiin, en écoutant les petits oiseaux chanter et en découvrant les petits secrets des habitants.
- Vous êtes plutôt réalistes en mode "Bordel mais ça va me mener où tout ça ? C'est quoi l'enjeu ? Pourquoi y'a plus personne ?": là vous pouvez directement choisir l'option 2 et suivre l'orbe de lumière, certes légèrement menaçante par moment (des petites voix bizarres s'en échappent), qui vous guidera vers les endroits stratégiques pour l'histoire.
Dans tous les cas, vous allez devoir marcher, marcher, marcher assez lentement (bon, il y a quand même la gachette R2 qui vous permettra d’accélérer progressivement) ! Personnellement ça ne m'a pas dérangé mais ça peut faire perdre patience.
J'avoue que pendant les 2/3 du jeu j'ai opté pour l'option 1 mais vers la fin j'ai un peu perdu patience (et je me suis perdue aussi) et j'ai préféré suivre l'orbe dès que je sentais que j'allais trop m'éloigner. Sachez que si vous optez pour l'option 2 dès le début, vous réduisez votre durée de jeu de moitié. J'ai dû mettre environ 7h à le finir, il vous en faudra sans doute 4 en optant pour la rapidité.
Et puis le jeu en vaut la chandelle : au contact de l'orbe de lumière vous allez pouvoir revivre les scènes de vie des habitants à travers le point de vue de personnages très différents mais tous plutôt attachants. Mais aux endroits où l'on ne vous attendait pas, vous allez pouvoir en découvrir davantage sur les relations qu'entretenaient les défunts et leurs sentiments, les rancœurs, les amitiés, les doutes, l'infidélité de certains...
Car ils ont beau ne plus faire partie de ce monde, il semblerait que leur âme, discernables sous forme de petites silhouettes lumineuses et de voix qui se font entendre, "hantent" toujours le village.
Le jeu cite d'ailleurs Douglas Hofstader et sa vision de la trace, ou plutôt des dernières lueurs, laissées par l'être humain après sa mort auprès de ceux qui lui sont chers. Qu'elles soient lumineuses ou plus sombres...
In the wake of a human being’s death, what survives is a set of afterglows, some brighter and some dimmer, in the collective brains of those dearest to them. There is, in those who remain, a collective corona that still glows.
Douglas Hofstadter.
En rentrant dans leur intimité, on aurait presque l'impression de perturber l'équilibre et le climat tranquille qui régnait dans le village. Chaque fin de chapitre donne d'ailleurs systématiquement lieu à une sublime scène finale où le jour laisse place à la nuit. Le tout dans une ambiance très mystique.
La spiritualité versus la science
Le titre du jeu a toute son importance. "The Rapture", avec un R majuscule, se traduit en français par "l'Enlèvement". J'avoue ne pas y connaître grand-chose en christianisme mais le stuperbe (stupide et superbe rhooo) film This is the end de Seth Rogen & Evan Goldberg m'a bien fait intégrer le principe. Sinon selon wikipédia, l'Enlèvement c'est "un événement de l'eschatologie chrétienne, dans lequel les chrétiens seraient rassemblés vers le ciel pour rencontrer le Christ à son retour, sept ans avant l'établissement de son règne".
Face à la spiritualité, on a Kate, un des protagonistes centraux. Sans vous en dévoiler trop sur l'intrigue, Kate représente plutôt la science et le pragmatisme ce qui la rend finalement un peu seule au monde face à la communauté (dans le sens littéral, des habitants vivant ensemble pour le bien commun et le bien de chacun) de Yaughton parfois un peu intrusive.
C'est un peu perché mais en même temps rappelons que The Chinese Room a été fondée par un écrivain (aux racines contre-culture), Dan Pinchleck et une compositrice, Jessica Curry.
Une intrigue intéressante, voire captivante, qui vous laissera probablement frustrés et sans-réponse. Le jeu a même réussi à m'emmener vers une fausse piste avec les espèces de codes pas tout à fait binaires que je pensais devoir déchiffrer. J'étais mignonne avec mon carnet et mon crayon.
La libre-interprétation... La confrontation Science / Spiritualité, qui représentent plutôt bien les deux façons de jouer dont je vous parlais. Des magnifiques paysages, une ambiance mystérieuse qui monte parfois en tension, et une bande-originale mystique pour sublimer le tout. La recette parfaite !
Figurez-vous que l'Enlèvement se dit aussi le Ravissement. Tiens donc, c'est effectivement avec une admiration intense que j'ai parcouru Everybody's Gone to the Rapture.
Comment conclure ? Parlons peu parlons bien.